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Triste chronique à l’insu de notre plein gré…

Belle matinée dimanche dernier. Nous étions quatre cyclos partis faire une sortie avec le club de Machecoul où Christiane et Jean-Claude, figures tutélaires du club, ont trouvé asile après leur émigration de Rezé la Tumultueuse. Précisons que la « Randonnée des 2 clochers » était au calendrier en alternative avec l’habituelle rando de St Herblain et que la satisfaction des organisateurs de la Gilles de Retz les a amenés à nous promettre une visite de leur part à notre prochaine organisation du Loroux-Bottereau. Un bienfait n’est jamais perdu !

Nous n’avions pas fait 6 km que Marceline, trop heureuse de retrouver « Jean-Claude le Meccano », crève. Il répare, on repart. La matinée est humide et douce et nous roulons dans cet Éden provisoire qu’est un territoire sans creux ni bosses. Le terrain plat, c’est comme l’absence de saisons aux Antilles : au début on adore, puis progressivement on ressent un manque… Heureusement, il y a le vent !

Nous n’en étions pas là et roulions fort tranquillement dans une belle campagne arborée où le jaune automnal prospérait sur le vert, empruntant de petites routes sinueuses sans aucune circulation ou presque, chauffant l’amitié par des conversations divagantes autour du risque de pluie, de la culture de tomates hors sol, des dernières itinérances des copains et des dahlias blancs… La routine !

Soudain l’un de nous aperçoit des perdreaux devant nous sur la route. Ils nous ont vus et se sont arrêtés. Ils haussent le col et analysent le danger que nous représentons. À trente mètres, ils commencent à courir pour nous fuir de leur démarche balancée. Ils sont six adultes, en pleine forme. Nous les rattrapons et ils finissent par s’envoler, en ligne droite d’abord, puis virent sur l’aile et survolent un champ de maïs en direction d’un petit bois. Battements d’ailes saccadés succèdent à de petits planés. Nous les observons avec un sourire quand une série de détonations éclatent ; nous sommes en octobre et un groupe de chasseurs veillait en lisière.

Fin de partie pour nos oiseaux.

Si ma mémoire est bonne, en France chaque année, les chasseurs tuent quarante millions d’animaux et en blessent 5. Parmi eux quinze millions d’oiseaux dont une moitié provient d’élevages et ont été relâchés plus ou moins récemment, l’autre étant composée d’animaux sauvages, sédentaires ou migrateurs.

Un tiers des espèces d’oiseaux a disparu, pas les chasseurs. Parfois c’est le manque de nourriture qui crée l’extinction des espèces. Lors d’un voyage itinérant, je me souviens d’être passé en vélo avec mes camarades dans un nuage de chimie grise à Saint Émilion ; pas d’insectes dans les vignes. Pas non plus dans les blés, les luzernes ou les cultures. Donc plus d’oiseaux qui s’en nourrissaient.

On peut vivre sans lièvres ni lapins, sans renards, bécasses ni tourterelles. Des rapaces, on ne voit guère plus que des buses ratissant de leur vol paresseux des champs déserts ; où sont passés les faucons ? Dans mon jardin, j’avais dix espèces de passereaux en hiver, j’en ai perdu la moitié. Notre société nous entraîne vers l’élimination de la vie animale, sans se soucier du nécessaire équilibre de la nature.

Un cyclo, c’est souvent un amoureux de la nature qu’il sillonne à petite vitesse. Amoureux transi.

Bien sûr, cette chronique n’a rien à faire ici et le club est ouvert à tous, si des amis chasseurs veulent répondre par écrit, ils sont bienvenus, d’autres aussi qui partageraient mon point de vue.

Je voulais simplement exprimer la tristesse que nous soyons devenu rabatteurs, à l’insu de notre plein gré.

En souhaitant ardemment que nos petits-enfants ne roulent pas dans une nature vide.

Pour mémoire, le pamphlet bien documenté du naturaliste Pierre Rigaux « Pas de fusil dans la nature », qui vient de sortir.